Le père d’Edmond était un homme de la terre, un vrai paysan.
Il revendiquait ce terme, affirmant qu’agriculteur ne voulait rien dire.
Il n’a jamais conduit un véhicule, il se déplaçait avec la charrette tirée
par un cheval ou en bicyclette.
L’histoire se passe dans les années 70, en Provence, dans le Luberon.
« J’étais avec mon père, en vélo tout deux et on rentrait à la maison
après le travail.
En passant près d’un champ de pêchers qui nous appartenait,
on aperçoit une famille, les parents et 3 enfants entrain de voler
des pêches.
Mon père s’arrête, pose son vélo contre le talus, s’approche de ces gens.
Je pensais qu’il allait les chasser. Mais il s’adresse à une fillette
qui mordait dans une pêche et lui dit gentiment:
» Oh! Oh! mademoiselle, il ne faut pas manger cette pêche,
voyons, tu vois bien qu’elle n’est pas mûre. Attend, je vais te montrer. »
Et il prend la fillette dans ses bras (elle devait avoir 6 ans) devant
les parents abasourdis, l’élève jusqu’à une branche et lui montre
3 fruits « Tu vois! Ces 2 pêches sont encore un peu vertes,
mais celle du milieu est jaune, elle est mûre.
Prend-la par dessous et tu verras, elle va tomber toute seule dans ta main ».
La gamine fait ce qu’il lui dit et la pêche se détache toute seule
dans sa main. Mon père la pose alors par terre et s’adresse aux parents
qui ne savent que dire et il leur explique, sur le ton de la conversation amicale, qu’il ne faut pas laisser les enfants manger n’importe quel fruit.
Les fruits verts peuvent leur faire mal, et il leur montre comment
choisir une pêche. Puis il leur explique tout le travail que représente
le fait de faire venir une pêche, la plantation des arbres, l’entretien, le nettoyage du sol pour éviter les mauvaises herbes, tailler les arbres
chaque automne, l’engrais, les labourages tout ca pour en arriver
à la récolte qui est le résultat de toute une année de travail.
Les parents, rouges de confusion mais soulagés de voir mon père
leur parler gentiment, l’écoutent et répondent à ses questions avec
plaisir quand il leur demande d’ou ils viennent, où ils ont leur
résidence secondaire.
Mon père leur raconta qu’il avait des cousins à Marseille, qu’il savait
que la vie en ville n’était pas toujours agréable.
Bref, ils ont sympathisé, d’autant plus facilement que mon père savait
être chaleureux et très bavard.
Ces gens, comme pour s’excuser lui disent à un moment donné:
« Vous savez, on prenait juste 2 pêches pour les enfants » et mon père
leur à répondu en riant « il ne faudrait pas que tous ceux qui passent
sur cette route prennent 2 pêches, sinon au moment de la récolte,
il n’en resterait plus ».
Cette famille sont devenus des amis par la suite. Nous, nous avons
repris nos vélos et avons continué notre chemin et je dis alors à mon père:
« J’ai cru que tu allais les engueuler, tu as été plutôt gentil »
Il m’a répondu « Tu vois, fiston! Ce qu’il fallait , c’est leur expliquer
que ces pêches, c’est notre gagne-pain.
On peut être gentil et ne pas laisser les gens vous prendre pour un couillon ». »
——————————————————————
On peut être gentil et ne pas laisser les gens nous prendre pour des couillons… La prochaine fois que vous aurez l’impression
d’être « pris pour un couillon », pensez-y!
——————————————————————-
« En mûrissant, faites comme la lavande, adoucissez-vous. »
Proverbe anglais
« Il n’est pas permis à tous les hommes d’être grands, mais ils peuvent tous être bons ». Jean-François Marmontel
Par Edmond.